Shelter Bay Marina

février 2022

arrivée à Colòn

Nous sommes en route pour Shelter Bay, la marina d’attente pour le passage du Canal. En effet, il y a un délai en général incompressible de 5 jours entre l’arrivée à la marina, où les autorités du canal viennent mesurer officiellement le bateau, avant l’obtention d’une date pour le transit.

Dans notre cas, faisant partie d’un rallye, l’organisation a déjà réservé des dates de de transit à l’avance, pour deux groupes de bateaux consécutifs : 12 bateaux transiteront les 3 et 4 mars, et 12 autres les 4 et 5 mars. 

Nous arrivons beaucoup plus tôt que les 5 jours règlementaires, car nous devons sortir Saga de l’eau pour réparer notre saildrive, endommagé par un fil de pêche. La sortie de l’eau sera pour le 22 février. Nous arriverons donc la veille, le 21, en provenance direct des San Blas. 

Nous avons effectué cette navigation d’environs 80 NM en huit heures, partant vers 6h du matin. La mer est grosse, et nous ne sommes pas amarinés, après 8 jours passé dans les eaux paisible des San Blas. Nous sommes tous les 3 un peu dans le coton, Arthur, Anna et moi. Heureusement, Loïc veille. 

En chemin, nos passons Isla Grande, Layton et Portobello, trois lieux où il serait sûr et agréable de s’arrêter – il faut être très prudent, certain mouillages des côtes du Panama sont des coupe-gorge, comme la Bahia Nombre de Dios, pourtant distante de quelques milles seulement .

Voilà déjà que nous apercevons les cargos, par dizaines, en attente devant le breakwater du port de Colon.

Les enfants sont chargés de gonfler les pare-battages qui avaient été remisés depuis la Martinique. 

Comme nous n’avons qu’un moteur, nous décidons d’entrer sous voile dans le breakwater, nous affalerons la grand voile devant la marina qui se situe encore à quelques milles nautiques devant nous. 

On a beau être déjà venus ici, ces mastodonte d’acier interpellent, par leur masse, leur volume. 

Nous franchissons le breakwater

Shelter bay Marina

L’arrivée à la marina s’annonce délicate, avec un seul moteur et pas loin de 20 noeuds de vent. Mais Loïc maitrise et plaque Saga au ponton, où une place nous a été réservée à l’entrée de la marina, à quelques mètres de la mangrove où les oiseaux coassent.  

Le lendemain, pour la sortie de l’eau, c’est une autre histoire, la manoeuvre est bien plus délicate, et le vent n’a pas baissé : toujours 20 noeuds. Il s’agit de quitter le ponton, de faire demi-tour puis de se diriger vers la darse où se situe le travel-lift, de s’engager parallèlement aux quais qui ont un espacement tout juste pour notre bateau, avant de passer les sangles qui nous soulèveront de l’eau.

Loïc a l’idée de demander de l’aide à nos amis qui sont déjà arrivés : Maxime de Vitia vient avec son annexe, amarrée entre les coques arrières : il servira de propulseur d’étrave arrière. 

Domi et Arthur sur PomIII en font de même à l’avant avec leur annexe, pour faire propulseur d’étrave à l’avant .

Finalement, nous n’aurons pas besoin de l’aide de Pierre et Mia (Biotrek), venus aussi en renfort. 

L’opération est un succès, Loïc donne ses ordres aux deux « propulseurs d’étrave » , qui aident à faire pivoter le bateau sans difficultés : il s’agit de juste doser. 

Nous voilà engagés : les sangles sont positionnées par des plongeurs et vont soulever Saga. 

Nous voilà presque sortis, prêts à être amenés sur notre poste de stationnement. 

Nous voilà presque sortis, prêts à être amenés sur notre poste de stationnement. 

Commence alors le travail de réparation du sail drive.

Nous en profitons également rajouter quelques couches d’anti-fouling ce qui retardera d’autant la prochaine sortie de l’eau.  : initialement prévue en Nouvelle-Zélande, nous n’aurons à la faire qu’en Afrique du sud. 

Loïc passe ses journées à jouer au contremaitre car les ouvriers ne sont pas spécialement rigoureux – ou plutôt, leur encadrement n’est pas très exigeant sur la qualité du travail; Or, les tarifs pratiqués sont au plus haut : la sortie nous coutera plus cher qu’à la Grande Motte!! Alors, nous avons le droit d’être exigeants. Pour cette raison, nous passerons 6 jours et 5 nuits au sec, là ou 3 ou 4 auraient suffit, avec un peu plus d’organisation et de bonne volonté. 

La vie quotidienne dans un bateau au sec n’est pas aussi confortable qu’au mouillage ni au ponton. La première contrainte est que notre réfrigérateur qui a un circuit de refroidissement à l’eau de mer, a dû être coupé et vidé. Heureusement, nous avons un frigo portatif en 12V dans lequel nous gardons de quoi nous bricoler les petit-déjeuners et les pique-niques du midi. 

Pour le soir par contre, nous dinons au restaurant de la marina : c’est d’abord pour faire plaisir aux enfants et donner moins de travail aux parents qui ainsi n’ont pas de cuisine ni de vaisselle à faire, mais aussi parceque faire la vaisselle est compliqué : l’eau s’évacue sous le bateau, ce qui pose des problèmes en cas d’évacuation, surtout lorsque l’on refait comme nous un antifouing propre : on n’a pas envie de coulure de sauce tomate!!

L’autre petit plaisir du jour, c’est la piscine, une des rares marinas que nous ayons fréquentée qui dispose de cet équipement : les enfants y passent tous leurs après-midis.  Il faut dire que la chaleur est accablante dans ce climat équatorial. La poussière du chantier aussi est pénible, nous nous sentons vite sales. Le plouf du soir, suivi d’une bonne douche et d’un repas au resto est notre récompense. Les enfants bossent tous les matins. Je me partage entre l’école et la rédaction du blog-qui a beaucoup de retard car la période de fêtes de fin d’année a été festive : j’ai privilégié le temps en famille. 

Ensuite, une connexion internet inexistante pendant 6 semaines entre Los Roques et les San Blas n’a pas aidé. Je publie donc un article par jour. Les autres journées sont consacrées aux courses à Colon, distante d’une dizaine de kilomètre. 

Je m’y rends deux fois avec le bus de la marina pour effectuer les avitaillements d’épicerie. Je ferai le frais à Panama City, après avoir franchi le canal

Ces courses d’épicerie sont essentielles car en Polynésie, en particulier aux Gambier et aux Tuamotu où nous allons, les denrées seront rares, peu variées et chères – mis à part les produits de base comme la farine, le sucre, le riz…. qui sont subventionnés par le gouvernement. Il faut donc faire de grosses provisions pour 3 mois.

Les enfants travaillent tous les matins, nous gardons le rythme habituel ; Si nous avons besoin d’une bonne connexion internet, nous nous installons à une table au restaurant, ou sinon nous restons à bord. 

Visite de l'ancien site de l'Armée Américaine à Shelter Bay

Ce matin-là, c’est exceptionnel, l’école se fait en extérieur : le gardien de la marina, est aussi guide naturaliste. Il travaille à la préservation de l’environnement de Shelter Bay, qui est un lieu  paradoxalement isolé et source de biodiversité. Ancien lieu de garnison pour les militaires américains après-guerre, le site a été abandonné et rendu aux Panaméens dans les années 70.

Resté inoccupé, la foret a reprit ses droit et envahit les lieux. C’est donc, aux portes de la marina, une foret relativement préservée. 

Là, un palmier décapité par un orage : des herbes poussent dedans!

De part et d’autre de la route, la foret est dense, peuplée de ficus. 

Là, l’arbre un gommier rouge, ou « arbre à touriste », car il pèle de fines pellicules blanches, révélant une écorce intacte : il s’agit en fait d’un mécanisme visant à se protéger des … champignons, qui prolifèrent en milieu humide.

Notre guide nous raconte la foret, mais aussi la période historique de présence américaine, ou des garnisons entière venaient pour se former à la guerre en milieu tropical. Shelter Bay était alors un site militaire très actif. 

Il nous conte aussi les animaux, comme ces termites et les fourmis qui toutes deux greffent leur habitat aux arbres : les fourmilière, de forme ronde, et les termitières, plutôt ovales. 

Plus loin sur le sol, les enfants remarquent de droles de morceaux feuilles bouger en procession : ce sont des fourmis champignonnistes, qui vivent en symbiose avec un champignon, le nourrissant de feuilles, qui le transforment en compost, qui lui-même nourrit les larves!

Nous observons de longues minutes le ballet des ouvrières qui portent des feuilles bien plus grosses qu’elles, et des soldats, qui déblaient leur chemin et les protègent. 

Beaucoup de bambou également, de plantes épiphytes, 

et quelques animaux comme ce perroquet bleu et rouge apercu furtivement… 

Aussi, des ratons-laveurs, et ce rapace .

Et les vestiges, des camps de garnison, mais aussi ces bunkers qui servaient à manutentionner du matériel lourd et des armes 

des milliers de mètres carré demi-enterrés, 

que nous visitons dans la pénombre.

Derniers préparatifs avant transit et mise à l'eau

De retour au chantier, il nous tarde d’être remis à l’eau, c’est pour bientôt, l’anti-fouling est presque prêt. 

Nous assistons au briefing du transit du canal en présence d’officiel du canal et de l’agent. Beaucoup de questions fusent de nos compagnons du GLYWO, car c’est une traversée assez impressionnante. 

Nous passerons le Canal de manière classique pour les voiliers : en radeau, c’est à dire trois bateaux à couple, celui du milieu assurant la propulsion. Saga sera au centre, entouré de Nop-No, un monocoque et de Manaca, un Outremer 51, et sur deux jours, entrecoupés d’une nuit sur le lac Gatùn. 

Ce qui est moins habituel, c’est qu’au lieu de passer derrière un cargo, comme nous l’avions sur Moby en avril 2017, nous passerons en flotille de 4 radeaux, soit 12 voiliers d’un coup.

Un dernier briefing au bar avec nos compagnons de route, Manaca et Nop-Nop, et nous sommes fins prêts!

Finalement, c’est le grand jour, nous retournons à l’eau, 

Il était temps car dans 2 jours, nous transitons le canal! Notre passage a en effet été avancé de quelques jours, ce qui ne nous pose pas de problème au contraire :   nous sommes prêts et avons très hâte de nous retrouver dans l’océan Pacifique.