Nav' Fiji-NZ
Octobre 2022J1 : une première nuit en mer agitée… conforme aux prévisions
Nous avons quitté Fiji hier soir, un peu à regret, car nous serions restés volontiers encore un mois dans ce pays si accueillant et varié.
Mais voilà qu’une bonne fenêtre météo pour rallier la Nouvelle-Zélande s’est présentée un peu plus tôt que prévu. Nous avons sauté sur l’occasion et nous sommes préparés en quelques heures : ravitaillement de gasoil (au cas où une avarie nous force à rallier au moteur), (petites) courses car tous les produits frais restant dans les frigos devront être jetés en mer avant l’arrivée…, formalités à Vuda Marina avec l’aide de Victor du GLYWO qui se trouvait sur place, tout s’est déroulé vite et bien.
Même les deux bouquets de kava de trop ont trouvé preneur, avec les musiciens de la marina venus nous souhaiter au-revoir en chansons.
Nous sommes les seuls parmi nos amis à appareiller ce jour-là, les autres partiront demain ou le surlendemain, mais avec une fenêtre un tout petit peu moins bonne.
Nous étions à la passe de Navula avant 18h, et surtout avant la pluie qui arrivait sur Fiji.
Comme prévu, le vent de 20 noeuds est monté à 25 dans la nuit, avec quelques petites rafales à 30. Heureusement, notre angle au vent est plutôt pas mal, entre 90° et 100°, et le vent devrait encore adonner un peu dans la journée. La mer est grosse dehors, avec 3 bons mètres de creux, mais très longue. Alors tout cela donne des conditions musclées, mais avec 2 ris et la trinquette, le bateau est plutôt sous-toilé, et file à 10 noeuds de moyenne.
Il passe étonnement bien les vagues, sans ralentir. Alors bien sûr ça tape, et les paquets de mer passent au-dessus du rouf parfois : mais les conditions ne devraient que s’améliorer dans les heures et les jours qui viennent. C’est la « promesse » de cette fenêtre météo : 24h un peu fatigantes, suivies de 3 jours et demi beaucoup plus agréables, avec un vent portant qui passe au nord – donc plutôt « chaud », et possiblement du soleil. Le calcul que nous faisons est qu’il vaut mieux se prendre du « mauvais temps » au départ de Fiji en eaux chaudes qu’à l’arrivée en eaux froides. En effet, une dépression est prévue à la fin du mois en Nouvelle-Zélande, pour Halloween!!!
Etonnamment, personne n’est malade à bord, les enfants et moi sommes à peine somnolents, ils ont dormi comme des bébés cette nuit dans le carré rabaissé en grand lit. Loïc et moi nous sommes relayés cette nuit toutes les deux heures, somnolant plus que dormant pendant notre temps de repos de cette première nuit agitée. Mais déjà ce matin, le mer s’est encore rallongée et a un peu diminué, nous allons pouvoir faire de bonnes siestes. Au compteur, nous avons effectué 255NM en 24h.
J2, mardi 26 octobre 2022
Nous passons notre seconde nuit en navigation. La mer est moins forte que la veille et le vent a lui aussi perdu presque 10 noeuds : nous avons largué un ris en début de soirée car le vent moyen est de 16 à 18 noeuds. Ce matin, le vent mollissant, nous avions roulé la trinquette et déroulé le genois. La vie à bord est donc beaucoup moins agitée que la veille, Ce qui a tenu Loïc éveillé en ce début de nuit, ce sont les grains, qui font monter le vent à 25 noeuds, très ponctuellement dans les rafales. Il faut alors aller vite choquer les voiles, puis les reborder et faire ré-accélérer le bateau après la molle d’après-grain;
Nous glissons à plus de 10 noeuds de moyenne depuis le début du départ, conformément au routage. Les conditions sont d’ailleurs conformes au temps que nous avancons, ce qui est toujours rassurant.
Les températures baissent : nous avons perdu 2 degrés en journée, baissant de 28 à 26°, (et nous devrions continuer à perdre tous les jours 2°…) mais les nuits sont encore plus fraiches! 20° dehors!! Alors on a sorti les bonnets, d’autant que nous n’avons pas encore vu le soleil! Demain on espère.
Nous dormons tous dans le carré, la mer est encore trop agitée pour être confortable dans les coques-ou tout simplement, nous ne sommes pas encore bien amarinés pour y être à l’aise!
Demain, le vent devrait continuer à mollir et à adonner tranquillement, et les vagues à diminuer encore pour se contenir dans les 2m. L’ambiance à bord est excellente, en mode lounge dans la carré rabaissé en grand lit : on y dort, on y lit, on y joue, on regarde des films, on discut,e on écoute des podcasts ou de la musique, C’était jour off aujourd’hui, demain, avec le temps qui se remet, l’école reprend.
Ce soir les bateaux du Glywo fêtaient à Musket Cove leur départ de Fiji vers la Nouvelle-Zélande; j’aurais aimé être avec eux pour célébrer cette nouvelle étape! Nous le ferons à leur arrivée à Opua où nous attend déjà NopNop. La flotte devrait prendre la mer demain, on leur souhaite belle mer et bon vent!
J3, mercredi 26 octobre
A l’approche de la nouvelle-Zélande, les températures baissent tous les jours un peu plus. En 5 jours, nous allons passer d’un climat tropical très chaud (28° à 30° en journée), au climat tempéré de la fin du printemps austral (16 à 18°) : c’est comme passer en 5 jours de la fin de l’hiver antillais au printemps breton. Depuis 3 jours, nous sortons tous les jours un vêtement de plus : leggings, chaussettes, chaussures de pont, bonnet, polaires…. Ce soir ce seront les couettes, pour des quarts de nuits douillets.
Je me réjouis d’autant plus de changer de climat que j’y trouverai des réminiscences de ma Bretagne : nous allons retrouver longues soirées d’été, le froid qui saisit quand on se baigne dans l’eau à 18 degré, puis le soleil qui réchauffe la peau, les randos en pleine nature sans être accablé de chaleur, les picnic du midi sur la plage, le surf en combi néoprène… Je me réjouis aussi de retrouver les fruits de mer, moules, huitres ou coquilles st-Jacques, les fraises, les fruits rouges, les pommes du verger, les poissons d’eau froide sans ciguatera…
Il sera amusant de se trouver à la fois dépaysé mais aussi tellement chez soi… Curieusement, en arrivant à Fiji, j’ai eu la même sensation d’être à la maison, tant j’ai retrouvé dans ce pays et ses habitants mon pays d’adoption, l’île Maurice : même gentillesse au quotidien, même multiculturalisme, même attachement aux fêtes traditionnelles indiennes, musulmanes ou chrétiennes, mêmes marchés foisonnants de légumes improbables et d’épices, même diaspora à l’international, même curiosité de l’autre, même fraternité, même fierté de son pays indépendant.
Qu’il est incongru de se sentir chez soi aux antipodes!
J4 : jeudi 27 octobre 2022
Moins de 300NM nous restent à parcourir pour atteindre la Nouvelle-Zélande. Le vent continue presque imperceptiblement de faiblir, tout en adonnant, ce qui nous permet de maintenir tout juste les 10 noeuds de moyenne aujourd’hui ; demain matin à l’aube, nous hisserons le spi, ce qui nous réchauffera – ce matin, c’est le code zéro que nous avons hissé au réveil, une belle manière tonique de commencer la journée ; j’ai aussi fait des crêpes, ce qui a réchauffé le carré, fait plaisir à nos papilles et empli le bateau d’un doux parfum beurré.
La mer est peu agitée et la glisse fantastique, nous avons bien récupéré des premières 24h de navigation très agitées. La vie à bord est revenue à la normale, quelques heures d’école le matin, des jeux de société, de la lecture, des films, et toujours aussi beaucoup de cuisine : Anna nous a régalés d’un tiramisu aux fruits rouge, et j’ai fait une très belle soupe de curry rouge thaï avec des légumes multicolores.
On se réjouit aussi que le reste de la flotte, parti 2 et 3 jours après nous bénéficient d’aussi bonnes conditions : tout le monde file droit sur la Nouvelle-Zélande, menés par Vitia qui cavale à 11 noeuds de moyenne sans faiblir!!
Le soleil peine toujours à pointer son nez, et mis à part les couchers de soleil, nous vivons dans un camaieux de noirs, de bleus , de gris et de blanc. Heureusement, nos moyennes de vitesse sont très bonnes, et le moral est excellent!
Ce soir, nous avons sortir les couettes pour les enfants qui vont se blottir douillettement dedans cette nuit. Bonheur.
J5 : vendredi 28 octobre
Nous entamons ce soir notre 5ème jour de mer, depuis notre départ lundi soir de Fiji. Reste moins de 100 NM à parcourir. Nous devrions arriver à Opua dans une douzaine d’heure, soit 4 jours et demi après être partis.
Le vent a été plus mou que prévu aujourd’hui, heureusement que nous avions gréé le spi tôt ce matin, ce qui nous a permis de bien abattre. Nous l’avons affalé au coucher du soleil, et ce soir, nous sommes sous GV haute, code zéro, avec 15 noeuds de vent fraichissant à 16, ce qui nous permet de faire une route au 160, pas tout à fait la route directe malheureusement, qui voudrait que nous fassions cap plein sud. C’en est aussi fini des moyennes à plus de 10 noeuds, on s’y était bien habitué
Ces dernières 24h nous ont vu faire entre 8 et 9 noeuds en moyenne.
Même si notre capitaine peste un peu que les vents soient un poil plus faible que prévu, et un peu trop abattu pour nous permettre ce soir de faire route directe, nous sommes très satisfaits de la fenêtre météo que nous avons saisie, qui devrait nous permettre de faire route 100M% à la voile, sans faire de moteur, et de ne pas avoir à négocier de front à l’arrivée.
Les copains du Glywo avancent vite pour le moment, menés par Vitia qui maintient sa moyenne à plus de 11 noeuds, et toute la bande des catas qui filent entre 9 et 10 noeuds. Et nos amis des monocoques, Fou de Bassan, Caps et Loly ont recréé une flotte dans la flotte, naviguant non loin les uns des autres.
Notre dernier repas en mer pour fêter l’arrivée prochaine en Nouvelle-Zélande fut gourmand : confit de canard, pommes de terre salardaises, aubergines confites, salade, suivi d’un far breton. Les températures fraichissant nous font apprécier un tel repas bien riche!
Bon quart à tous les marins en mer, bonne journée aux Européens, et bonne nuit aux autres!
Terre!!!
Terre! Terre! Voici au loin Ataroa, la terre du « long nuage blanc ». Ce matin, il s’agit plutôt d’un mince filet de terre brune noyé dans les nuages, et avec quelques trous de ciel bleu et de rares rayons de soleil qui nous réchauffent le corps et le coeur.
Nous sommes entourés d’oiseaux, sternes, fous et autres oiseaux marins, sur une mer « glaz », comme on dit chez nous, de la couleur de la mer d’Iroise : ni tout à fait fait gris, ni bleu ni vert. Un petit air de Bretagne qui nous ravit le coeur, la sensation de fraicheur, et ce puissant parfum de goemon, végétal et océnique à la fois. Nous y sommes, après 4 jours et demi de traversée, dans notre nouveau pays pour les 5 mois à venir.